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La demandeuse, mère d’une enfant d’un an et demi, est séparée du père depuis le début de la grossesse. La reconnaissance en paternité n’a eu lieu que peu de temps avant l’accouchement sans que la demandeuse en soit informée. Après de rares contacts, et alors que la demandeuse et sa fille ont changé de région et vivent à 600km du domicile paternel, le père a récemment déposé une requête devant le TGI afin de fixer un calendrier de visite élargi pour son enfant. « Depuis [la première nuit que l’enfant a passée auprès de son père], il y a 3 mois, celle-ci se réveille toutes les nuits en pleurs, prise de panique ». La mère a pris conseil auprès d’une psychologue, lui faisant part de ses craintes quant au souhait du père de recevoir  sa fille pour un séjour d’un mois. La psychologue a rédigé une attestation mentionnant la nécessité d’une adaptation progressive des visites de l’enfant chez son père que la demandeuse a joint au dossier pour le tribunal.  

De son côté, le père a également consulté une psychologue et lui a présenté des photographies de famille. La psychologue a rédigé une attestation, produite elle aussi au tribunal, où elle  évoque  le besoin de l’enfant de voir son père sur une durée suffisamment longue mais l’opposition de la demandeuse à cette perspective. Elle s’appuie « pour rédiger son document uniquement sur une parole : celle du père de [sa] fille » ainsi que sur les photos de famille apportées par celui-ci.

La demandeuse s’interroge sur la conduite de cette psychologue dans la mesure où cette dernière ne  l’a jamais rencontrée. Dès lors, « les faits n’ont pu être constatés  et (…) les affirmations [la] concernant sont fausses ». La demandeuse a tenté de joindre la psychologue rédactrice de cette attestation et a reçu une fin de non-recevoir.

La demandeuse souhaite connaître la position de la Commission à propos de cette attestation et questionne également le fait qu’il n’existe «pas d’instance qui contrôle et encadre la profession de psychologue ».

Document joint :

-       Copie de l’écrit de la psychologue consultée par le père de l’enfant.

Posté le 26-12-2016 16:11:31

Avis et classification CNCDP

Année de la demande : 2015

Demandeur :
Particulier (Parent)

Contexte :
Question sur l’exercice d’un psychologue

Objet de la demande :
Écrit d’un psychologue
Précisions :
Attestation

Questions déontologiques associées :

- Écrits psychologiques
- Évaluation (Évaluation de personnes que le psychologue n’a pas rencontrées)
- Responsabilité professionnelle
- Impartialité

Préambule :

La profession de psychologue n’a actuellement pas d’instance de régulation.

Comme l’avertissement ci-dessus le précise, les avis de la CNCDP sont consultatifs, la Commission rappelle cependant les différents niveaux de responsabilité du psychologue :

Principe 3 : Responsabilité et autonomie

Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle [...]

Après cette précision, la Commission propose de traiter le point suivant :

- Prudence et rigueur dans les écrits des psychologues concernant des personnes non rencontrées.

 

Prudence et rigueur dans les écrits des psychologues concernant des personnes non rencontrées.

Les psychologues sont régulièrement sollicités dans des contextes conflictuels, notamment au sujet des questions relatives aux  droits de visite et d’hébergement d’un enfant au domicile de parents séparés.

Dans ce contexte, il arrive que le parent à l’initiative de la consultation demande au psychologue de produire un écrit qu’il joindra à son dossier en justice.

D’un point de vue formel, un tel document doit faire apparaître des éléments qui permettent d’en identifier l’auteur de façon claire. En outre, la date et l’intitulé précis des documents permettent au lecteur de situer plus précisément l’objet de l’écrit.

Article 20 : Les documents émanant d'un psychologue sont datés, portent son nom, son numéro ADELI, l'identification de sa fonction, ses coordonnées professionnelles, l'objet de son écrit et sa signature […].

Dans la situation présentée, l’écrit de la psychologue consultée par le  père, en ne mentionnant ni la date, ni l’objet de l’écrit contribue à ne pas rendre explicite sa nature.

Bien souvent, les écrits effectués à la demande des personnes sont destinés à des tiers qui auront à prendre des décisions. Les informations qui seront alors délivrées par le psychologue doivent l’être avec prudence eu égard aux conséquences qu’elles peuvent avoir.

Article 17 : Lorsque les conclusions du psychologue sont transmises à un tiers, elles répondent avec prudence à la question posée et ne comportent les éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire.

Cette notion est aussi rappelée dans le Principe 2 :

Principe 2 : […] Quel que soit le contexte de son intervention et les éventuelles pressions subies, il fait preuve de prudence, mesure, discernement et impartialité.

Cette recommandation est d’autant plus nécessaire si le psychologue n’a pas rencontré les personnes concernées. Les avis qu’il formule peuvent concerner des dossiers ou des situations rapportées, cependant, les évaluations doivent systématiquement être effectuées sur la base de situations qu’il aura lui-même examinées.

Article 13 : Les avis du psychologue peuvent concerner des dossiers ou des situations qui lui sont rapportées. Son évaluation ne peut cependant porter que sur des personnes ou des situations qu'il a pu lui-même examiner

Des éléments comme des propos de tiers ou des photographies, peuvent être rapportés lors de consultation. Ceux-ci doivent être examinés avec prudence et le psychologue ne peut en élaborer des éléments psychologiques caractérisant la situation.

Principe 4 : Rigueur

Les modes d'intervention choisis par le psychologue doivent pouvoir faire l'objet d'une explicitation raisonnée et d’une argumentation contradictoire de leurs fondements théoriques et de leur construction. Le psychologue est conscient des nécessaires limites de son travail.

Dans un contexte de conflit parental et lorsqu’un seul des deux parents consulte, le  psychologue, est engagé à faire preuve de la plus grande prudence dans son analyse de la situation et de précautions quant au sens des propos rapportés par le consultant, il en va de sa responsabilité professionnelle :

Principe 3 : Responsabilité et autonomie

Outre ses responsabilités civiles et pénales, le psychologue a une responsabilité professionnelle. Dans le cadre de sa compétence professionnelle, le psychologue décide et répond personnellement du choix et de l'application des méthodes et techniques qu'il conçoit et met en œuvre et des avis qu’il formule […].

 

                               Pour la CNCDP

                               La Présidente

                                                                                          Catherine MARTIN

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