RÉSUMÉ DE LA DEMANDE Le demandeur est le père d’une enfant de sept ans. Il indique que depuis qu’il a engagé une procédure de divorce, la situation qui en découle est très conflictuelle. C’est dans ce contexte que la question d’un suivi pour l’enfant semble s’être posée pour les parents. Le père sollicite la psychologue qui le suit, afin que sa fille soit reçue et accompagnée dans ce moment difficile. La femme du demandeur ayant alors refusé, la démarche s’est interrompue. Informé quelques temps plus tard par l’enseignante de sa fille du fait que cette dernière est suivie par une psychologue, et bien que n’ayant pas été consulté, en particulier sur le choix du professionnel, le demandeur accepte cependant ce suivi psychologique dans l’intérêt de l’enfant. Huit séances se seraient ainsi déjà déroulées. À sa demande, il a pu rencontrer deux fois la psychologue, qui n’aurait pour autant pas donné suite à des demandes supplémentaires de rencontre. La démarche du demandeur auprès de la Commission est motivée par un écrit rédigé par la psychologue de sa fille, et nommé « Conclusion technique ». Il le reçoit peu de temps avant une audience devant le Juge aux Affaires Familiales (J.A.F). L’écrit est, selon lui, totalement à charge. La psychologue rapporte des propos de sa fille qui précise, par exemple, qu’il « la priver[ait] de son doudou, qu’elle se sentait épiée et enregistrée en permanence ». La psychologue adresse « cette note technique » par courriel aux deux parents, que la mère de l’enfant transmet alors au juge. Le Juge aux Affaires Familiales diligente alors une enquête sociale et une expertise psychologique. Devant l’expert, l’enfant dément CNCDP, Avis 2023 - 12 Page 2 sur 6 les faits et propos que la psychologue lui avait attribués. Ces propos ont aussi permis de supposer qu’il existait un lien, par l’intermédiaire d’une relation commune, entre la psychologue mise en cause et la mère de l’enfant. Le demandeur juge que la psychologue a manqué d’impartialité dans ce contexte familial qu’elle savait conflictuel. Il attire l’attention de la Commission sur le non-respect, qu’il présente comme des manoeuvres « inacceptables », des règles du code de déontologie. Il ajoute que, en parallèle de sa démarche auprès de la Commission, il « n’exclut pas la possibilité d’engager des poursuites tant sur le plan civil que pénal ». Documents joints : - Copie d’un courriel de la psychologue de l’enfant intitulé « Note clinique à l’intention des parents de X ». - Copie d’un courriel du père de l’enfant en réponse à celui de la psychologue.
Posté le 22-11-2024 19:28:34

Avis et classification CNCDP

Année de la demande : 2023

Demandeur :
Particulier (Parent)

Contexte :
Procédure judiciaire entre parents

Objet de la demande :
Écrit d’un psychologue
Précisions :
Compte rendu

Questions déontologiques associées :

- Autorisation des détenteurs de l’autorité parentale
- Compétence professionnelle (Analyse de l’implication personnelle du psychologue)
- Consentement éclairé
- Discernement
- Écrits psychologiques (Identification des écrits professionnels)
- Impartialité
- Information sur la démarche professionnelle (Explicitation de la démarche aux usagers /clients ou patients (avant ou/ et en cours d’intervention))
- Traitement psychologique de personnes liées au psychologue
- Probité
- Respect de la personne
- Transmission de données psychologiques (Compte rendu à des partenaires professionnels avec accord et/ou information de l’intéressé)

CNCDP, Avis 2023 - 12 Page 1 sur 6 CNCDP, Avis N° 2023 - 12 Avis rendu le 30 octobre 2023 Principes : 1, 2, 3, 4 - Titre I : Exercice professionnel - Articles : 4, 5, 8, 9, 11, 15, 16, 17, 18 Le code de déontologie des psychologues concerne les personnes habilitées à porter le titre de psychologue conformément à la loi n°85-772 du 25 juillet 1985 (JO du 26 juillet 1985). Le code de déontologie des psychologues de 1996 a été actualisé en février 2012, puis en septembre 2021, et c’est sur la base de celui-ci que la Commission rend désormais ses avis. RÉSUMÉ DE LA DEMANDE Le demandeur est le père d’une enfant de sept ans. Il indique que depuis qu’il a engagé une procédure de divorce, la situation qui en découle est très conflictuelle. C’est dans ce contexte que la question d’un suivi pour l’enfant semble s’être posée pour les parents. Le père sollicite la psychologue qui le suit, afin que sa fille soit reçue et accompagnée dans ce moment difficile. La femme du demandeur ayant alors refusé, la démarche s’est interrompue. Informé quelques temps plus tard par l’enseignante de sa fille du fait que cette dernière est suivie par une psychologue, et bien que n’ayant pas été consulté, en particulier sur le choix du professionnel, le demandeur accepte cependant ce suivi psychologique dans l’intérêt de l’enfant. Huit séances se seraient ainsi déjà déroulées. À sa demande, il a pu rencontrer deux fois la psychologue, qui n’aurait pour autant pas donné suite à des demandes supplémentaires de rencontre. La démarche du demandeur auprès de la Commission est motivée par un écrit rédigé par la psychologue de sa fille, et nommé « Conclusion technique ». Il le reçoit peu de temps avant une audience devant le Juge aux Affaires Familiales (J.A.F). L’écrit est, selon lui, totalement à charge. La psychologue rapporte des propos de sa fille qui précise, par exemple, qu’il « la priver[ait] de son doudou, qu’elle se sentait épiée et enregistrée en permanence ». La psychologue adresse « cette note technique » par courriel aux deux parents, que la mère de l’enfant transmet alors au juge. Le Juge aux Affaires Familiales diligente alors une enquête sociale et une expertise psychologique. Devant l’expert, l’enfant dément CNCDP, Avis 2023 - 12 Page 2 sur 6 les faits et propos que la psychologue lui avait attribués. Ces propos ont aussi permis de supposer qu’il existait un lien, par l’intermédiaire d’une relation commune, entre la psychologue mise en cause et la mère de l’enfant. Le demandeur juge que la psychologue a manqué d’impartialité dans ce contexte familial qu’elle savait conflictuel. Il attire l’attention de la Commission sur le non-respect, qu’il présente comme des manoeuvres « inacceptables », des règles du code de déontologie. Il ajoute que, en parallèle de sa démarche auprès de la Commission, il « n’exclut pas la possibilité d’engager des poursuites tant sur le plan civil que pénal ». Documents joints : - Copie d’un courriel de la psychologue de l’enfant intitulé « Note clinique à l’intention des parents de X ». - Copie d’un courriel du père de l’enfant en réponse à celui de la psychologue. AVIS AVERTISSEMENT : La CNCDP, instance consultative, rend ses avis à partir des informations portées à sa connaissance par le demandeur, et au vu de la situation qu’il décrit. La CNCDP n’a pas qualité pour vérifier, enquêter, interroger. Ses avis ne sont ni des arbitrages ni des jugements : ils visent à éclairer les pratiques en regard du cadre déontologique que les psychologues se sont donné. Les avis sont rendus par l'ensemble de la commission après étude approfondie du dossier par deux rapporteurs et débat en séance plénière. La Commission se propose de traiter du point suivant : - La déontologie du psychologue engagé dans l’accompagnement d’un mineur concerné par une situation conflictuelle entre parents La déontologie du psychologue engagé dans l’accompagnement d’un mineur concerné par une situation conflictuelle entre parents Dans le cas de la prise en charge d’un enfant mineur, particulièrement s’il s’agit d’un suivi psychologique, le psychologue recherche l’accord des deux parents. Dans la CNCDP, Avis 2023 - 12 Page 3 sur 6 situation présentée à la Commission, la psychologue aurait gagné à respecter les recommandations de l’article 11 du Code : Article 11 : « Dans le cadre d’une pratique auprès d’un·e mineur·e, la·le psychologue s’assure autant que possible de son consentement. Elle·il recherche l'autorisation des représentants légaux dans le respect des règles relatives à l'autorité parentale ». Le père, bien que n’étant informé ni du suivi ni du choix de la psychologue, a accepté, au moins dans un premier temps, la psychologue choisie par la mère. Il est important que le psychologue s’assure du consentement des personnes concernées et les informe de la possibilité de faire appel à d’autres professionnels tel que le rappelle l’article 9, ainsi que l’article 11 déjà cité : Article 9 : « La·le psychologue recherche systématiquement le consentement libre et éclairé de ceux qui la·le consultent ou qui participent à une évaluation ou une expertise. Elle·il les informe de façon claire et intelligible des objectifs, des modalités, du coût éventuel et des limites de son intervention. Le cas échéant, elle·il leur indique la possibilité de consulter un·e autre praticien·ne. » De plus, selon le demandeur, le lien de la psychologue qui suit sa fille avec sa future ex-femme ne serait pas que professionnel. Il est important, à plus forte raison dans des situations de séparation conflictuelle entre parents, que le psychologue demeure vigilant quant au risque de se trouver dans des situations pouvant le mener à un possible conflit d’intérêts, et susceptibles ainsi de mettre en cause son impartialité. Le psychologue s’attache à être vigilant quant au respect du Principe 4 et de l’article 16 : Principe 4 : Compétence « La·le psychologue tient sa compétence : - de connaissances théoriques et méthodologiques acquises dans les conditions définies par l’article 44 de la loi du 25 juillet 1985 modifiée, relative à l’usage professionnel du titre de psychologue ; - de l’actualisation régulière de ses connaissances ; - de sa formation à discerner son implication personnelle dans l’approche et la compréhension d’autrui . Chaque psychologue est garant de ses qualifications particulières. Elle·il définit ses limites propres compte tenu de sa formation et de son expérience. Il est de sa responsabilité déontologique de refuser toute intervention lorsqu’elle·il sait ne pas avoir les compétences requises. Quels que soient le contexte de son intervention et les CNCDP, Avis 2023 - 12 Page 4 sur 6 éventuelles pressions subies, elle·il agit avec prudence, mesure, discernement et impartialité. » Article 16 : « La·le psychologue n’engage pas d’interventions impliquant des personnes auxquelles elle·il est personnellement lié·e. Face à un risque de conflits d’intérêts, la·le psychologue est amené·e à se récuser. » Dans le cadre de sa pratique, le psychologue est amené à rédiger des écrits. Le courriel rédigé par la psychologue de l’enfant, et qui a pour en tête « Note clinique à l’intention des parents de X », est destiné à chacun des deux parents ; y figurent leur nom et chacune de leur adresse courriel. En prenant en compte l’autorité parentale partagée, elle va ainsi dans le sens de l’article 11 cité ci-dessus. Cependant, dans ce contexte de séparation conflictuelle, la psychologue manquerait de prudence en ne prenant pas en considération la compréhension et l’usage que chaque parent pourrait faire de son écrit, ce que recommandent le Principe 3 et l’article 8 du Code : Principe 3 : Intégrité et probité « En toutes circonstances, la·le psychologue respecte les principes éthiques, les valeurs d’intégrité et de probité inhérents à l’exercice de sa profession. Elle·il a pour obligation de ne pas exploiter une relation professionnelle à des fins personnelles, religieuses, sectaires, politiques, ou en vue de tout autre intérêt idéologique. Elle·il prend en considération les utilisations qui pourraient être faites de ses interventions et de ses écrits par des tiers. » Article 8 : « Dans tout échange entre professionnels ayant pour objet l'examen de personnes ou de situations, la·le psychologue partage uniquement les informations strictement nécessaires à la finalité professionnelle, conformément aux dispositions légales en vigueur. En tenant compte du contexte, elle·il s’efforce d’informer au préalable les personnes concernées de sa participation à ces échanges. » L’écrit rédigé par la psychologue et qui a été transmis à chacun des parents, l’a été à la demande de l’enfant. La psychologue a donc respecté le Principe 2 du Code : Principe 2 : Respect de la vie privée, du secret professionnel, de la confidentialité « La·le psychologue est soumis·e à une obligation de discrétion. Elle·il s’astreint au secret professionnel et à la confidentialité qui doivent être garantis dans ses conditions CNCDP, Avis 2023 - 12 Page 5 sur 6 d’exercice. En toutes circonstances, elle·il en informe les personnes concernées et recherche leur consentement éclairé. Elle·il respecte le principe fondamental que nul ne peut être contraint de révéler quoi que ce soit sur lui-même. » Même si la psychologue semble vouloir veiller à ne jamais établir de distinction de mérite entre les deux parents, son écrit ne rapporte que les propos concernant des demandes de l’enfant à l’égard de son père, comme le fait de pouvoir garder son doudou avec elle. Cet écrit ne paraît pas respecter l’impartialité recommandée par les articles 5 et 15 : Article 5 : « En toutes circonstances, la·le psychologue fait preuve de mesure, de discernement et d’impartialité. La·le psychologue accepte les missions qu'elle·il estime compatibles avec ses fonctions et ses compétences dans le respect du présent Code. Si elle·il l’estime utile, elle·il peut orienter les personnes ou faire appel à d’autres professionnels. » Article 15 : « La·le psychologue présente ses conclusions de façon claire et adaptée à la personne concernée. Celles-ci répondent avec prudence et discernement à la demande ou à la question posée. Lorsque ces conclusions sont transmises à un tiers, elles ne comportent les éléments d’ordre psychologique qui les fondent que si nécessaire. L'assentiment de la personne concernée ou son information préalable est requis ». Les destinataires de l’écrit de la psychologue et l’objet de celui-ci figurent bien sur le courriel mais son numéro Adéli, ses coordonnées professionnelles et sa signature n’apparaissent pas. Seul son nom figure en bas de son écrit. Son courriel aurait gagné à être mieux documenté pour respecter les recommandations de l’article 18 du Code : Article 18 : « Les documents émanant d'un·e psychologue sont datés, portent son identité, son titre, son numéro d’inscription sur les registres légaux en vigueur, ses coordonnées professionnelles, sa signature ainsi que la·le destinataire et l'objet de son écrit. Seul la·le psychologue auteur·e de ces documents est habilité·e à les signer, les modifier, ou les annuler. Elle·il fait respecter la confidentialité de son courrier postal ou électronique ». L’écrit de la psychologue, transmis par la mère au juge, a probablement été un élément conduisant celui-ci à engager une procédure. Quand une situation apparaît comme préoccupante, particulièrement s’il s’agit d’un enfant mineur, le psychologue s’attache à évaluer avec discernement la conduite à tenir avec pour objectif la protection de l’enfant, ainsi que le recommande l’article 17 : CNCDP, Avis 2023 - 12 Page 6 sur 6 Article 17 : « Dans le cas de situations susceptibles de porter atteinte à l’intégrité psychique ou physique de la personne qui la·le consulte ou à celle d’un tiers, la·le psychologue évalue avec discernement la conduite à tenir. Elle·il le fait dans le respect du secret professionnel et des dispositions légales relatives aux obligations de signalement. La·le psychologue peut éclairer sa décision en prenant conseil, notamment auprès de confrères ou consoeurs expérimenté·e·s. » Enfin, la Commission souhaite rappeler, tout particulièrement dans le cadre d’une séparation conflictuelle et d’autant plus si un enfant mineur est concerné, l’importance du Principe 1 du Code, qui met en avant le respect des droits fondamentaux de chaque personne : Principe 1 : Respect des droits fondamentaux de la personne « La·le psychologue réfère son exercice aux libertés et droits fondamentaux garantis par la loi et la Constitution, par les principes généraux du Droit communautaire et par les conventions et traités internationaux. Elle·il exerce dans le respect de la personne, de sa dignité et de sa liberté. La·le psychologue s'attache à respecter l'autonomie de la personne et en particulier son droit à l'information, sa liberté de jugement et de décision. Toute personne doit être informée de la possibilité de consulter directement la·le psychologue de son choix. » Pour la CNCDP Le Président Antony CHAUFTON La CNCDP a été installée le 21 juin 1997 par les organisations professionnelles et syndicales de psychologues. Ses membres, parrainés par les associations de psychologues, siègent à titre individuel, ils travaillent bénévolement en toute indépendance et sont soumis à un devoir de réserve. La CNCDP siège à huis clos et respecte des règles strictes de confidentialité. Les avis rendus anonymes sont publiés sur les sites des organisations professionnelles avec l’accord du demandeur. Toute utilisation des avis de la CNCDP par les demandeurs se fait sous leur entière responsabilité.

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