| Année de la demande : 2006 Demandeur :Particulier (Parent)
 Contexte :Procédure judiciaire entre parents
 Objet de la demande :Écrit d’un psychologue
 Précisions :
 Rapport d’enquête
 Questions déontologiques associées : - Évaluation (Relativité des évaluations)
- Évaluation (Droit à contre-évaluation)
 - Traitement équitable des parties
 - Compétence professionnelle (Formation (formation initiale, continue, spécialisation))
 - Mission (Compatibilité des missions avec la fonction, la compétence, le Code de déontologie, dans un contexte professionnel donné)
 | Il n’entre pas dans les missions de la CNCDP d’évaluer la  pertinence des conclusions rédigées par un psychologue. La CNCDP a pour mission de  rappeler les principes déontologiques qui régissent l’exercice professionnel de  la psychologie en rapport avec le cadre d’intervention de la situation  rapportée par les demandeurs. En conséquence, la Commission traitera des  questions suivantes : 1/ le caractère relatif de toute évaluation psychologique et la  possibilité de demander une contre-évaluation
 2/ le traitement équitable des parties
 3/ l’ambiguïté des missions
 4/ le discernement
 Caractère  relatif de toute évaluation psychologique et possibilité de demander une  contre-évaluation  Dans tous les cas où une personne  conteste les conclusions d’une évaluation psychologique, y compris celles  produites dans le cadre d’une expertise judiciaire, le recours légitime est de  demander une contre-évaluation, qui est affirmée comme un droit à l’article 19 du Code de  Déontologie :Article 19. « (…) Dans toutes les situations  d'évaluation, quel que soit le demandeur, le psychologue rappelle aux personnes  concernées leur droit à demander une contre-évaluation. »
 En effet, toute évaluation ayant un caractère relatif, le code  de déontologie des psychologues en fait l’un des principes directeurs de leur  exercice professionnel :
 Titre I, 5. Qualité  scientifique. (…) Toute évaluation ou tout résultat doit pouvoir faire  l'objet d'un débat contradictoire des professionnels entre eux.
 Partant de ce principe, le  psychologue s’abstient de tirer des conclusions définitives, comme l’ établit  l’article 19 :
 Article 19 - Le  psychologue est averti du caractère relatif de ses évaluations et  interprétations. Il ne tire pas de conclusions réductrices ou définitives sur les  aptitudes ou la personnalité des individus, notamment lorsque ces conclusions  peuvent avoir une influence directe sur leur existence.
  Traitement équitable de chaque partie, dans le  cadre d’une expertise  Comme le stipule la dernière phrase  de l’article 9, le psychologue est  tenu d’être impartial, c'est-à-dire qu’il ne doit pas prendre parti : Article 9. -« (…) Dans les situations d'expertise  judiciaire, le psychologue traite de façon équitable avec chacune des parties  (…). »
 Le psychologue sait en effet qu’un  conflit n’est pas à sens unique et sa formation lui permet de repérer les  stratégies défensives de chacun, ce qui, dans les cas de désaccords parentaux  pour la garde des enfants, consiste le plus souvent pour chaque parent à  discréditer l’ex-conjoint. Ambiguïté du mandat confié à la psychologue dans  la situation présente  1/ Ambiguïté de l’intitulé : « enquête  psychologique » :Une enquête, fût-elle  « psychologique », n’est ni une évaluation ni un examen  psychologique. Dans le cadre d’une procédure judiciaire, le juge peut ordonner  une enquête de personnalité, ou une enquête sociale, qui sont bien distinctes  de l’expertise psychologique. L’enquête consiste à recueillir des informations  sur la moralité et les conditions de vie des intéressés, parfois sur leur  personnalité. Il semblerait que les personnes qui réalisent ces enquêtes ne  soient pas tenues d’avoir une formation particulière. Contrairement à l’enquête, une  expertise psychologique ne peut être confiée qu’à un psychologue en titre et  elle comporte des missions d’évaluation et d’interprétation qui ne sont  aucunement assimilables à une enquête.
 La demande du JAF (juge aux affaires  familiales) est en l’occurrence très ambiguë puisqu’il semble avoir ordonné une  « enquête psychologique » : il s’agit donc bien d’une enquête et  non d’un examen psychologique à proprement parler, mais le choix du terme  « psychologique » risque d’introduire une autre dimension.
 Face à de telles demandes, le ψ se  trouve dans une situation paradoxale : le juge l’a-t-il désigné en sa  qualité de psychologue, ou d’enquêteur ?
 2/ Ambiguïté de l’identification du psychologueL’ambiguïté de la demande du juge se  retrouve dans la réponse du psychologue dans la mesure où la formule de  présentation du signataire du rapport ne mentionne pas sa qualité de  psychologue (à moins que cette mention n’ait été effacée avec le nom) mais  apparaît à la suite de la signature sous forme « psychologue  clinicien ». 3/ Ambiguïté du libellé des missionsLes missions se situent dans différents registres : - Certaines se situent clairement dans  le registre de l’enquête : « rapporter tous renseignements sur les  garanties présentées sur les plans : (…) moral, éducatif et matériel par  le père et la mère ainsi que le cas échéant de leurs parents ou des personnes  qui partagent leur existence ».
 - D'autres se situent dans le registre d’une intervention de  médiation : « de rechercher avec les parents des solutions quant à l’objet  du litige (…) ».
 - En outre, une autre mission est mentionnée, qui n’entre ni  dans le cadre des compétences d’un psychologue, ni dans celui d’un  enquêteur : « de tenter de finaliser un protocole d’accord signé par  les parties ».
 Le discernement  Confronté à des missions ambiguës, il  incombe au psychologue de les faire clarifier auprès du demandeur, et  éventuellement de les refuser s’il estime que l’ambiguïté ne peut être levée,  ou si la mission qui lui est confiée ne relève pas directement de ses  compétences. C’est ce qu’affirme le Titre  I, 2 du code de déontologie des psychologues :
 Titre  I, 2 / Compétence. (…)  Chaque  psychologue est garant de ses qualifications particulières et définit ses  limites propres, compte tenu de sa formation et de son expérience. Il refuse  toute intervention lorsqu’il sait ne pas avoir les compétences requises.
 Ainsi que l’article 7 :
 Article 7 - Le psychologue  accepte les missions, qu'il estime compatibles avec ses compétences, sa  technique, ses fonctions, et qui ne contreviennent ni aux dispositions du  présent Code, ni aux dispositions légales en vigueur.
 ConclusionLa situation présentée est  illustrative de la méconnaissance que peuvent avoir les juges de la nature des  expertises et enquêtes qu’ils demandent, de leurs cadres, de leurs finalités et  des compétences et qualifications qu’elles requièrent.
 A l’inverse, elle est aussi  illustrative de la difficulté qu’ont parfois les psychologues à s’en tenir à  leur cadre d’intervention, à le faire connaître aux personnes qui s’adressent à  eux, et à refuser des missions qui n’entrent pas dans leurs compétences  professionnelles.
 Avis rendu  le 05/05/07Pour  la CNCDP
 La  Présidente
 Anne  Andronikof
 Articles du code cités dans l'avis : 7, 9, 19 ; Titres I, 2 ; I, 5 |