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Le père d'une enfant de 7 ans, séparé de la mère depuis 5 ans, et assurant une garde alternée, conteste la pratique d'une psychologue. Celle-ci reçoit sa fille en consultation depuis plusieurs mois sans qu'il en ait été avisé. Il en a eu connaissance par le biais d'une attestation fournie par la psychologue à la demande de la mère, pour servir dans une demande de révision du mode de garde. Le demandeur a consulté le site Internet de la CNCDP et relevé différents articles du Code de déontologie des psychologues, à l'appui desquels il estime que la psychologue « a violé la Déontologie de sa profession…». Puis, il a pris rendez-vous avec la psychologue – qui en a informé la mère– pour lui reprocher ses erreurs déontologiques et lui remettre le rapport d'expertise médico- psychologique rédigé par un psychiatre au moment de la séparation, document qu'il considère être « une anamnèse plus complète que ce qu'elle avait pu voir de façon unilatérale ». La psychologue a rédigé une seconde attestation, produite en justice par la mère, faisant le compte rendu de cet entretien, attestation que le demandeur estime « plus qu'indigne d'un professionnel, puisque ayant les Articles de Déontologie dont je l'accuse d'être en faute, elle récidive sur plusieurs points.. ». Il a ensuite interdit à la psychologue de poursuivre le traitement de sa fille.
En demandant l'avis de la Commission, il insiste sur deux points : « l'absence du respect du secret professionnel » de la part de la psychologue, et « la comparaison, dans le fond et la forme », entre l'expertise du psychiatre et les attestations de la psychologue.

Documents joints :

  • Les deux attestations de la psychologue présentées au JAF
  • La copie des «articles de la CNCDP» remis par le demandeur à la psychologue (textes des articles du Code 4, 10, 11, 14, 17, 19, Titre I-1 et I-6, avec un bref commentaire pour chacun, par rapport à la situation précise)
  • Le rapport d'expertise médicale rédigé par un psychiatre (bilan familial).
  •  Le courrier du demandeur à la psychologue, lui signifiant son opposition à la     poursuite du traitement avec sa fille.
Posté le 30-11-2010 17:20:00

Avis et classification CNCDP

Année de la demande : 2007

Demandeur :
Particulier (Parent)

Contexte :
Procédure judiciaire entre parents

Objet de la demande :
Écrit d’un psychologue
Précisions :
Attestation

Questions déontologiques associées :

- Écrits psychologiques (Identification des écrits professionnels (identification du psychologue, du destinataire))
- Responsabilité professionnelle
- Consentement éclairé
- Autorisation des détenteurs de l’autorité parentale
- Traitement équitable des parties

A partir de la situation exposée par le demandeur, la Commission traitera des points suivants
- Les attestations établies par des psychologues et leurs exigences
- La responsabilité professionnelle du psychologue
- Le respect du secret professionnel
- Les règles déontologiques relatives aux autorisations des détenteurs de l'autorité parentale
- Le traitement équitable des parties en cas de conflit familial

1- Les attestations établies par des psychologues et leurs exigences
Tout professionnel peut établir une attestation à la demande d’une personne, attestation qui fait état d'une constatation établie dans le cadre de son exercice professionnel. Il y précise sa profession, la date et le contexte de la demande et éventuellement les méthodes qu'il a utilisées pour étayer ses constatations. Ce type d'attestation porte généralement la mention «Attestation remise à l'intéressé, pour dire et faire valoir ce que de droit ».

Le Code de Déontologie des Psychologues précise également l'importance de la mention du destinataire :
Article 14 - «Les documents émanant d'un psychologue (attestation, bilan, certificat, courrier, rapport, etc.) portent son nom, l'identification de sa fonction ainsi que ses coordonnées professionnelles, sa signature et la mention précise du destinataire ».
L’absence de mention du destinataire sur les deux attestations produites par la psychologue – qui par ailleurs portent clairement ses coordonnées professionnelles – peut introduire une confusion dans le statut de ces écrits
La première attestation annonce son objectif de « dresser un bilan psychologique » d'une enfant suivie plusieurs mois, et se conclut par une proposition concernant le mode de garde souhaitable.
La seconde attestation relate le contenu de la consultation avec le père de l'enfant venu rencontrer la psychologue. 
La Commission estime qu’il appartient au juge de distinguer entre ces deux types d’attestation et de leur réserver le sort qui leur convient respectivement.
2- La responsabilité professionnelle du psychologue
Dans ses écrits professionnels, le psychologue engage sa responsabilité professionnelle et sa probité :
Article 12 «  Le psychologue est seul responsable de ses conclusions. Il fait état des méthodes et outils sur lesquels il les fonde, et il les présente de façon adaptée à ses différents interlocuteurs, de manière à préserver le secret professionnel… ».
Le Code précise également l'exigence de discernement que le psychologue doit avoir quant à l'utilisation de ses écrits :
Titre I-6 «  Tout en construisant son intervention dans le respect du but assigné, le psychologue doit donc prendre en considération les utilisations possibles qui peuvent éventuellement en être faites par des tiers »

3- Le respect du secret professionnel
S’il s’avérait  qu’un psychologue rédige une attestation sur le contenu d’une consultation, sans en référer à la personne concernée pour avoir son accord, il dérogerait au Code de déontologie dont le premier principe rappelle l'obligation, pour un psychologue, d'assurer la confidentialité des échanges avec les personnes qu'il reçoit, que ce soit dans le cadre de son exercice professionnel ou dans des communications externes.
Titre I-1 « (…) [Le psychologue] n’intervient qu’avec le consentement libre et éclairé des personnes concernées.... Le psychologue préserve la vie privée des personnes en garantissant le respect du secret professionnel (...) »

4- Les règles déontologiques relatives aux autorisations des détenteurs de l'autorité parentale

La question de l'autorisation parentale est traitée à l'article 10 du Code de déontologie des psychologues :
Article 10. « Le psychologue peut recevoir, à leur demande, des mineurs ou des majeurs protégés par la loi. Son intervention auprès d'eux tient compte de leur statut, de leur situation et des dispositions légales en vigueur. Lorsque la consultation pour des mineurs ou des majeurs protégés par la loi est demandée par un tiers, le psychologue requiert leur consentement éclairé, ainsi que celui des détenteurs de l'autorité parentale ou de la tutelle. »
Si l'autorité parentale est partagée, on peut concevoir que l'autorisation des deux parents n'est pas obligatoire pour une consultation ponctuelle concernant leur enfant. Par contre, si un suivi psychologique régulier se met en place, la Commission a souvent recommandé, dans des cas semblables, que le parent non demandeur soit informé et associé à la décision concernant le suivi de l'enfant, dans l'intérêt même de ce dernier.

5- Le traitement équitable des parties en cas de conflit familial
L'article 9 du Code stipule que : « (…) Dans les situations d'expertise judiciaire, le psychologue traite de façon équitable avec chacune des parties (…). »

La Commission a souvent recommandé d'étendre l'exigence de prudence et d'impartialité pour les psychologues, au-delà des situations d'expertise judiciaire, à l'ensemble des pratiques et des écrits psychologiques requis dans les situations de conflit familial. En effet, le psychologue sait qu'un conflit n'est pas à sens unique et sa formation lui permet de repérer les stratégies défensives de chacun, ce qui, dans les cas de désaccords parentaux pour la garde des enfants, consiste le plus souvent pour chaque parent à discréditer l’autre.

 

Pour la Commission
La Présidente
Anne Andronikof

Articles du code cités dans l'avis : Articles 9, 10, 12, 14, Titre I-1, Titre I-6

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Avis 07-03 .doc

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