| Année de la demande : 2005 Demandeur :Particulier (Tiers)
 Contexte :Procédure judiciaire entre parents
 Objet de la demande :Intervention d’un psychologue
 Précisions :
 Signalement
 Questions déontologiques associées : - Signalement 
- Discernement
 - Compétence professionnelle (Formation (formation initiale, continue, spécialisation))
 - Évaluation (Relativité des évaluations)
 - Traitement équitable des parties
 - Transmission de données psychologiques (Compte rendu aux parents)
 - Confraternité entre psychologues
 - Respect du but assigné
 | La  commission rappelle qu’elle n’a pas qualité pour examiner la matérialité des  faits qui lui sont communiqués. Elle ne se prononce que sur la conformité des  pratiques professionnelles des psychologues à la déontologie de leur  profession. Elle traitera les points suivants :-  La démarche de signalement et ses exigences de discernement et de  prudence.
 -  La communication d’informations concernant un mineur aux détenteurs de  l’autorité parentale.
 1) La  démarche de signalement et ses exigences de discernement et de prudence  1.1 La  prudence et le discernement dans la démarche de signalementL’article 13 du Code de déontologie fait obligation à tout  psychologue
 « (...) de signaler aux autorités judiciaires chargées de  l’application de la Loi  toute situation qu’il sait mettre en danger l’intégrité des personnes ».
 Cette  démarche nécessite une évaluation «en conscience» pour le psychologue.  L’article 13 se termine d’ailleurs avec cette recommandation :
 «Le psychologue peut éclairer sa décision  en prenant conseil auprès de collègues expérimentés ».
 Le signalement ayant été fait très rapidement,  il est probable que la psychologue n’a pas pu tirer profit de cette  recommandation.
 Dans  la situation considérée, le texte du signalement, qui émane d’un centre  hospitalier, fait état de deux consultations communes de la psychologue avec le  signataire de l’écrit, probablement un médecin, puisqu’il est question d’un  examen somatique (mais tous les noms ayant été occultés par la demandeuse, on  ne peut que le supposer). L’auteur du signalement précise que lors de la  première consultation, il n’a pas été possible de confirmer les dires de la  mère et de faire répéter ses propos à l’enfant. A la seconde consultation, il  conclut que l’examen somatique ne détecte rien d’anormal, mais que « cette  négativité ne doit toutefois pas mettre en doute les paroles de  l’enfant ». L’évaluation de la psychologue a donc été déterminante dans le  déclenchement du signalement, mais elle n’en a pas pris seule la  responsabilité.
 1.2 La  prudence et le discernement dans l’évaluation des propos de l’enfantLe  moment de la première consultation sollicitée par la mère de l’enfant (le jour  où le divorce est prononcé) et le contexte conjugal très conflictuel auraient  dû inciter la psychologue à une grande prudence, et à élaborer d’autres  hypothèses que celles proposées par la mère. Par ailleurs la difficulté à  interpréter les propos des très jeunes enfants aurait dû l’inciter aussi à  approfondir ses investigations. Le Code rappelle d’ailleurs les précautions à  prendre par les psychologues dans leur exercice professionnel.
 Titre I-2 : « Le psychologue tient ses compétences  de connaissances théoriques régulièrement mises à jour, d’une formation  continue et d’une formation à discerner son implication personnelle dans la  compréhension d’autrui. Chaque psychologue est garant de ses qualifications  particulières et définit ses limites propres, compte tenu de sa formation et de  son expérience. Il refuse toute intervention lorsqu’il sait ne pas avoir les  compétences requises »
 Titre I-5 : « Les modes d’intervention choisis par le  psychologue doivent pouvoir faire l’objet d’une explicitation raisonnée de  leurs fondements théoriques et de leur construction. Toute évaluation ou tout  résultat doit pouvoir faire l’objet d’un débat contradictoire des  professionnels entre eux »
 L’évaluation  des situations de suspicion d’abus sexuel sur de très jeunes enfants étant  particulièrement délicate, la   Commission ne peut que recommander de suivre le conseil  exprimé à la fin de l’article 13 «  Le psychologue peut éclairer sa décision en  prenant conseil auprès de collègues expérimentés ».
 1.3 La prudence et le discernement dans les conclusions A la suite de son évaluation, la psychologue déclare  entreprendre immédiatement «un travail de réparation avec l’enfant et un  travail de guidance avec la mère». La formulation même du travail entrepris  induit une certaine suspicion à l’encontre du père, de même que la décision de  faire coïncider la fin du traitement de l’enfant avec le non lieu. En orientant  ainsi son travail, la psychologue prend parti.
 Article 19 : «  le psychologue  est averti du caractère relatif de ses évaluations et interprétations. Il ne  tire pas de conclusions réductrices ou définitives sur les aptitudes ou la  personnalité des individus, notamment lorsque ces conclusions peuvent avoir une  influence directe sur son existence »
 1.4 La  psychologue devait-elle prendre plus d’informations, et en particulier, comme  le pense la demandeuse, informer le père de l’enfant et demander à le  rencontrer avant de faire un signalement, ou accepter de le rencontrer quand il  en a fait la demande ? La  psychologue n’était pas dans une mission d’expertise ordonnée par un juge, ce  qui aurait impliqué d’examiner tous les membres de la famille, mais dans une  démarche de consultation privée demandée par la mère de l’enfant. La  psychologue est donc restée dans sa mission de consultante centrée sur  l’enfant. Toutefois, le contexte familial aurait pu la rendre plus prudente  vis-à-vis des accusations de la mère de l’enfant, et l’inciter à entendre la  version des faits du père. Le Titre I-6 souligne cette exigence de  précaution :
 «  Tout en construisant son intervention dans le  respect du but assigné, le psychologue doit donc prendre en considération les  utilisations possibles qui peuvent en être faites par des tiers ».
 Lorsque le  père a lui-même souhaité la rencontrer à plusieurs reprises, pouvait-elle  refuser ?  L’article 9  précise « (…) dans les situations  d'expertise judiciaire, le psychologue traite de façon équitable avec chacune  des parties et sait que sa mission a pour but d'éclairer la justice sur la  question qui lui est posée et non d'apporter des preuves ».
 La   Commission a souvent estimé que cette exigence de traitement  équitable était à recommander, même en dehors d’un mandat d’expertise, aux  psychologues recevant des enfants pris dans un conflit familial aigu.
 2) La  communication d’informations concernant un mineur aux détenteurs de l’autorité  parentaleLa psychologue ayant informé le père qu’elle arrêtait la  prise en charge thérapeutique de son enfant pouvait-elle refuser de lui  communiquer un bilan ?
 L’article 12 qui traite  des conclusions du psychologue, précise :
 « (…) Les intéressés ont le droit d’obtenir un  compte rendu compréhensible des évaluations les concernant, quels qu’en soient  les destinataires »
 Le  père de l’enfant, avait toute légitimité de vouloir obtenir un compte rendu ou  au moins  un échange avec la psychologue  qui avait suivi son fils pendant presque deux ans et lui signifiait  personnellement qu’elle arrêtait le traitement.
 Conclusion La CNCDP rappelle  les exigences de prudence professionnelle soulignées par le Code à de  nombreuses reprises : discernement, qualité scientifique des  investigations, prudence des conclusions, souci permanent de l’information des  personnes concernées et recours à l’avis de collègues expérimentés pour prendre  davantage de recul. Ces exigences sont d’autant plus importantes à respecter  qu’elles concernent des situations de signalement potentiel.
   Avis rendu le 20/03/07Pour  la CNCDP
 La Présidente
 Anne Andronikof
 Articles du code cités dans  l'avis : Titre  I-2, I-5, I-6. Articles 9, 12, 13, 19.
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