| Année de la demande : 2011 Demandeur :Psychologue (Secteur Enseignement de la Psychologie)
 Contexte :Questionnement professionnel personnel
 Objet de la demande :Intervention d’un psychologue
 Précisions :
 Enseignement de la psychologie
 Questions déontologiques associées : - Abus de pouvoir (Abus de position)
- Code de déontologie (Référence au Code dans l’exercice professionnel, le contrat de travail)
 - Consentement éclairé
 - Discernement
 - Enseignement de la psychologie
 - Information sur la démarche professionnelle
 - Mission (Distinction des missions)
 - Mission (Compatibilité des missions avec la fonction, la compétence, le Code de déontologie, dans un contexte professionnel donné)
 - Probité
 - Respect de la personne
 - Respect du but assigné
 - Traitement psychologique de personnes liées au psychologue
 |                                                                    Au regard des questions posées,  la commission articulera sa réflexion autour des trois points suivants :
 
  Activité de recherche sur le terrain de stage,Consentement des personnes participant à une recherche,Recommandation d’une « formation  personnelle » dans un cursus universitaire. Activité de recherche sur le terrain de stageEn préambule, la commission souhaite préciser que  cette délicate question est étroitement subordonnée à la conception de la  recherche privilégiée dans chaque université et au sein de celle-ci, chaque  laboratoire. Dans la discipline Psychologie, en effet, le fonctionnement de la  recherche prend plusieurs formes permettant de distinguer de façon schématique  deux grands courants :  
  Une approche objective (modèles behavioriste,  cognitiviste…) considérant le patient comme un objet de recherche. Dans ce cas,  une activité clinique thérapeutique est différenciée de l’activité de recherche  et les patients sont distincts des participants à la recherche.Une approche subjective ou empirique (modèle  psychanalytique), dans laquelle les patients sont à la fois sujets et objets de  la recherche. Dans ce second modèle, la clinique peut nourrir la recherche, en  constituer le substrat fondamental sans que cela constitue une infraction  déontologique, pourvu que certaines précautions soient prises (consentement écrit  de la personne, confidentialité, anonymat des données recueillies notamment). L’étudiant  travaille alors à partir des observations et entretiens qu’il réalise,  fussent-ils à visée psychothérapeutique. Dans le cadre de leur cursus universitaire, les  étudiants en psychologie de master ont obligation d’effectuer un stage de  préprofessionnalisation auprès d’un psychologue, et de mener une recherche et  rédiger un mémoire qui en rende compte.Dans la  majorité des cas, sauf à accomplir deux stages distincts et complémentaires, la  recherche s’effectue sur le lieu même du stage destiné à la formation clinique  de l’étudiant.
 Dans l’hypothèse d’une recherche du type « objectif »,  il peut se produire une interférence entre apprentissage d’une activité  clinique à travers des entretiens de soutien psychologique par exemple, et un  travail d’investigation et recueil de données. Les personnes rencontrées pour  les entretiens et pour la recherche sont en effet parfois les mêmes.
 Cette interférence est inhérente à l’organisation  même du cursus universitaire prévoyant un seul stage pour répondre à deux  objectifs d’égale importance. Elle est également liée à la difficulté pour les  étudiants d’obtenir un stage de longue durée sous la responsabilité d’un  psychologue et aux exigences selon les universités en termes de nombre de  sujets pour réaliser une étude scientifiquement valide.
 Cette question de la prise en charge psychologique  d’une personne concomitante à une démarche de recherche, touche à la notion de distinction  des missions, qui vaut pout tout psychologue mais aussi psychologue en formation.
 Le principe I-6 de Respect du but assigné, rappelle en  effet que : « Les dispositifs  méthodologiques mis en place par le psychologue répondent aux motifs de ses  interventions, et à eux seulement. […] ».
 L’esprit de ce principe suggère implicitement la  nécessité d’un choix ou tout au moins d’une détermination claire de ses motifs  d’intervention, puis la mise en place de méthodes pour atteindre ses objectifs.
 L’article 4 précise par ailleurs la notion de  distinction des missions :
 Article 4 : […] Il [le psychologue] peut  remplir différentes missions, qu'il distingue et fait distinguer, comme le  conseil, l'enseignement de la psychologie, l'évaluation, l'expertise, la  formation, la psychothérapie, la recherche, etc. […].
 Or la méthode pour mener un entretien clinique à visée  de soutien ou thérapeutique est habituellement distincte de celle de  l’entretien à visée de recherche. L’étudiant, professionnel en formation et par  définition peu expérimenté, peut éprouver une certaine difficulté à réaliser  ces deux tâches auprès d’une même personne.
 Dans la situation évoquée, ce sera donc à  l’enseignant référent de la recherche (directeur de recherche), en partenariat  avec le psychologue référent de stage, et en fonction du modèle théorique  retenu, de réfléchir avec l’étudiant, à la méthodologie la plus adaptée à son  projet. Il pourra lui conseiller :
 
   Soit de  distinguer activité clinique proprement dite et activité de recherche en vue  d’un mémoire, donc de s’adresser à des personnes différentes pour l’une et  l’autre, Soit de les associer dans une démarche  intégrative. Article 31 : Le psychologue enseignant la  psychologie veille à ce que ses pratiques, de même que les exigences  universitaires (mémoires de recherche, stages professionnels, recrutement de  sujets, etc.), soient compatibles avec la déontologie professionnelle. […].Dans les deux cas, l’étudiant devra toujours informer  les participants sur les objectifs et modalités de sa recherche et s’assurer de  leur consentement, ainsi « éclairé ».
 Article 33 : Les psychologues qui encadrent  les stages, à l'Université et sur le terrain, veillent à ce que les stagiaires  appliquent les dispositions du Code, notamment celles qui portent sur la  confidentialité, le secret professionnel, le consentement éclairé. […].
 Dans l’hypothèse d’un nombre très restreint de  sujets/patients, le directeur de recherche peut inviter l’étudiant dont il est  référent, à recueillir ses données dans un autre cadre que celui du stage.
 Consentement des personnes participant à une  rechercheLe dispositif présenté d’initiation à la recherche  expérimentale en place dans certaines universités est une option relevant d’une  pédagogie active et participative, qui a des avantages en ce qui concerne la  transmission et l’appropriation de savoir et méthodologie.Certaines modalités exposées par le demandeur interrogent  cependant la commission au regard du code de déontologie des psychologues. Par  exemple le caractère « obligatoire » de l’inscription des étudiants à  une expérimentation en tant que participants (« cobayes ») et la  subordination de cette participation à des points de validation déterminants  dans l’obtention d’un examen. Ou encore le recueil de données par les chercheurs  pour leurs travaux, sans la garantie que celui-ci s’inscrive dans une véritable  recherche avec remise de formulaires d’information et de consentement et dont l’intitulé  et les modalités seraient fixés à l’avance.
 Ces divers points soulèvent la question du  consentement des personnes à participer à une recherche, quels que soient les  personnes (patients, usagers, volontaires, étudiants…), le type et les  modalités de recherche, et la question d’une certaine vulnérabilité inhérente  au statut d’étudiant.
 Étudiants et enseignants occupent en effet des  positions dissymétriques, les uns étant en attente d’un savoir et aspirant à  réussir, les autres dispensant ce savoir et détenant les clés de l’évaluation  et de la validation des acquisitions. Plusieurs articles du code nous éclairent  à ce sujet :
 L’article 9 rappelle la nécessité du consentement  des personnes avant toute intervention :
 Article 9 - Avant toute intervention, le  psychologue s'assure du consentement de ceux qui le consultent ou participent à  une évaluation, une recherche ou une expertise. Il les informe des modalités,  des objectifs et des limites de son intervention. […].
 L’article 11 souligne que le psychologue, et par  extension, l’enseignant chercheur dès lors qu’il transmet un savoir à de futurs  psychologues, doit veiller à ne pas user de sa position au regard d’objectifs  personnels :
 Article 11 - Le psychologue n'use pas de sa  position à des fins personnelles, de prosélytisme ou d'aliénation d'autrui.  […].
 L’article 31, déjà cité, met l’accent sur  l’indispensable compatibilité des pratiques d’enseignement avec la déontologie  professionnelle.
 L’article 34, en stipulant que  « […] Il [le psychologue enseignant] n'exige  pas des étudiants qu'ils suivent des formations extra universitaires payantes  ou non, pour l'obtention de leur diplôme. Il ne tient pas les étudiants pour  des patients ou des clients. […]. », pose la question de savoir si  les « manips » (manipulations) auxquelles participent les étudiants  font ou non partie de la formation universitaire obligatoire.
 Si elles font partie de la formation, elles opèrent  toutefois transitoirement une modification du statut de l’étudiant qui d’apprenant  devient participant à une expérimentation, et répondent à un mode de  participation incluant une forme de récompense ou gratification (des points, la  validation de l’examen).
 En cela, elles se démarquent de modalités  d’enseignement plus traditionnelles et appellent à une vigilance particulière  dans leur conception. Il existe un code de conduite des chercheurs dans les  sciences du comportement qui peut être utilement consulté à ce propos. La loi  Huriet (1988, modifiée en 2004) relative à la protection des personnes qui se  prêtent à des recherches biomédicales concerne également le champ des sciences  du comportement (annexe).
 Au regard des éléments précédents, la commission estime  qu’il serait important de bien réfléchir à la notion de manipulation  expérimentale avec participation des étudiants.
 Il serait ainsi souhaitable que cette modalité  pédagogique soit clairement indiquée dans le programme comme une option avec  des objectifs précis, distincte des travaux pratiques obligatoires. Il serait  judicieux que ces « manips » soient facultatives, non contingentées à  des points supplémentaires et à la validation d’un examen.
 Elles pourraient être explicitées par un document  d’information relatif à la recherche et un formulaire de consentement, remis  préalablement à l’étudiant avec un délai de réflexion suffisant et une  possibilité de retrait à tout moment de la recherche. Enfin, il serait légitime  que les chercheurs mentionnent l’origine des éventuels résultats collectés  après qu’ils aient été rendus anonymes.
 Recommandation d’une « formation  personnelle » dans un cursus universitaireAu-delà d’apports théoriques, de travaux dirigés  proposés dans le cadre universitaire et de stages qui permettent d’élaborer une  pratique, il est admis que la compétence clinique s’acquière aussi par un  travail sur soi, une réflexion approfondie sur son propre fonctionnement  psychique et sa posture professionnelle. Le principe I-2, de compétence le précise :
 Principe I-2 : Le psychologue tient ses  compétences de connaissances théoriques régulièrement mises à jour, d'une  formation continue et d'une formation à discerner son implication personnelle  dans la compréhension d'autrui. […].
 Ce principe ne précise cependant pas de quelle  manière il convient de se former à discerner son implication personnelle. Il  laisse ainsi toute latitude au psychologue et au futur psychologue de choisir  l’approche et la méthode qui lui conviennent, respectant en cela le principe  I-1 :
 Principe I-1 : Le psychologue réfère son  exercice aux principes édictés par les législations nationale, européenne et  internationale sur le respect des droits fondamentaux des personnes, et  spécialement de leur dignité, de leur liberté et de leur protection. […].
 Cette formation personnelle peut se faire en effet  au travers d’échanges avec des pairs, expérimentés ou non, de participation à  des synthèses, de réalisation de stages supplémentaires, d’un groupe d’analyse  de la pratique, d’une supervision universitaire ou externe, groupale ou individuelle…  et aussi de l’engagement dans une psychothérapie référencée à tel ou tel champ  conceptuel, telle ou telle école.
 Se gardant de toute préséance ou domination d’un  modèle qui risquerait de s’ériger en dogme, l’article 28 ajoute :
 Article 28 - L'enseignement présente les différents  champs d'étude de la psychologie, ainsi que la pluralité des cadres théoriques,  des méthodes et des pratiques, dans un souci de mise en perspective et de  confrontation critique. Il bannit nécessairement l'endoctrinement et le  sectarisme.
 Un passage de l’article 34 apparaît alors tout à  fait complémentaire :
 Article 34 – […] Il [le psychologue] n'exige pas  des étudiants qu'ils suivent des formations extra universitaires payantes ou  non, pour l'obtention de leur diplôme.
 Dans le respect de l’article précité, les  enseignants de psychologie ont ainsi toute légitimité à informer les étudiants  des différentes possibilités existantes mais devraient se garder de recommandations  qui peuvent revêtir un caractère inductif.
 Avis rendu le 23 mai 2011Pour la CNCDP
 La Présidente
 Marie-Claude GUETTE-MARTY
   Articles du code cités dans l'avis : Principes I-1, I-2, I-6 ; Articles 4, 9, 11, 28, 31,  33, 34.   Annexe :  Adresse du site internet relatif au code de conduite des  chercheurs dans les sciences du comportement : http://www.sfpsy.org/Un-code-de-conduite-des-chercheurs.html.Sur la protection des personnes, consulter la loi HURIET-SERUSCLAT n°  88-1138 du 20 décembre 1988 relative à la protection des personnes se prêtant à  la recherche biomédicale, modifiée par la loi de santé publique n°  2004-806 du 9 août 2004.
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